Les principes fondamentaux
Les droits sexuels doivent être garantis pour tout le monde. Ainsi, une personne consommatrice a le droit d’avoir des rapports sexuels, d’entretenir des relations affectives et d’avoir des enfants. Fonder une famille est un droit garanti par la Constitution suisse (art.14 Cst). Les personnes consommatrices peuvent souhaiter avoir des enfants ou non. Le cas échéant, il peut s’agir d’un projet parental actuel ou alors dans un avenir plus ou moins proche. Un projet parental et la parentalité peuvent être des leviers importants pour l’amélioration et le maintien de la santé d’une personne consommatrice. À l’inverse, une non-prise en compte des besoins voire une limitation injustifiée des droits peut conduire à une rupture de l’alliance et remettre en question l’accompagnement et ses effets positifs.
La protection des droits des personnes consommatrices doit être au cœur de leur accompagnement. Pour autant, la protection des enfants à venir ou déjà né·x·e·s doit également être garantie.
DES INSTITUTIONS ET DES PROFESSIONNEL·X·LE·S
Afin de garantir les droits des personnes, les institutions devraient inclure un accès à l’information concernant les enjeux de santé sexuelle, notamment reproductive, et de parentalité dans leurs visions, stratégies et mesures.
Parmi ces mesures devraient figurer des prises de position claires quant aux droits sexuels (y compris des personnes consommatrices) et la formation des équipes d’accueil et d’accompagnement sur ces enjeux.
La formation doit leur permettre de pouvoir aborder proactivement et de manière adéquate les questions intersectionnelles entre consommation et santé sexuelle.
DES OFFRES
Les offres d’accueil et d’accompagnement des personnes consommatrices devraient inclure la santé sexuelle, notamment reproductive, et la parentalité. Il s’agit de garantir un accès à une information objective sur les droits et possibilités ainsi qu’un accès réel et en temps voulu aux moyens utiles (contraception, interruption de grossesse, accompagnement du prénatal à la parentalité).
L’accès peut être garanti par la mise en place d’une offre intégrée, développée par l’institution elle-même et/ou dans le cadre de collaboration avec des organismes spécialisés, qui peuvent intervenir dans l’institution et/ou recevoir les personnes orientées par celle-ci.
Des services tels que Addi-Vie au CHUV sont spécialisés dans l’accueil de mères consommatrices et peuvent soutenir la mère et l’enfant.
DES EXEMPLES D’OFFRES
- Conseil et information sur la contraception, la réduction des risques et dommages liés au VIH, aux autres IST majeures et aux hépatites dans le cadre des entretiens individuels pour le suivi des consommations
- Espaces d’information
- Consultations en santé sexuelle et/ou de dépistage mises en œuvre par un organisme partenaire dans les locaux de l’institution spécialisée en addictions.
- Prescription de contraceptif par les médecins de l’institution, selon un protocole discuté avec un service partenaire.
- Protocole de prise de rendez-vous dans un organisme spécialisé (centre de santé sexuelle, cabinet de gynécologie, centre PrEP…)
- Mise à disposition de produits d’hygiène intime (serviettes/tampons pour les règles), de préservatifs et de tests de grossesse dans l’institution, si possible gratuitement.
- Protocole d’accompagnement des projets parentaux (prénatal), des grossesses et de la parentalité.
Le respect de la confidentialité est un principe éthique fondamental. Les professionnel·x·le·s sont en général tenus de protéger toutes les informations personnelles et médicales des patient·e·x·s
Il n’y a à priori aucune raison pour que les informations concernant la consommation d’un.x.e parent circulent entre pédiatre, infirmière scolaire et corps enseignant. La confidentialité doit être respectée et l’accord de la personne concernée doit être à la base de toute transmission d’informations à un tiers.
Les professionnel.x.le.s doivent avoir conscience des enjeux éthiques et trouver l’équilibre parfois complexe entre respect du secret professionnel, secret de fonction (Art.320 et 321 du Code pénal) ET du devoir de signalement (Art 32. LVPAE).
Afin de garantir les droits sexuels, il est nécessaire d’appliquer le concept d’empowerement. Dans ce cadre, il se réfère au droit des individus à exercer un contrôle sur leur corps et sur leur santé sexuelle.
Les droits des personnes doivent être respectés. La limitation des droits et libertés n’est acceptable que si elle est pleinement justifiée par la protection de la personne et/ou des enfants. Les motifs n’étant pas pérennes, ces restrictions doivent être limitées dans le temps et une évaluation doit être réalisée à intervalle régulier.
Afin de pouvoir décider de manière libre et éclairée par et pour elles-mêmes, les personnes doivent pouvoir accéder aux informations nécessaires. Une fois une décision prise, celle-ci doit être respectée et la personne doit pouvoir accéder aux moyens nécessaires à sa réalisation. Concernant la contraception et les projets d’enfant, le choix pouvant évoluer dans le temps, la question doit être abordée régulièrement.
Les institutions et leur personnel jouent un rôle essentiel. L’accès réel et complet aux informations et aux moyens doit être garanti. Dans l’accompagnement, la santé reproductive et la parentalité doivent être proactivement abordées. Le cas échéant, dans le cadre d’un projet coconstruit avec la personne concernée reposant sur un rapport de confiance mutuelle, l’accompagnement pourra inclure le suivi d’une contraception, d’un projet parental ou de la parentalité permettant de garantir la protection des enfants. Pour ce faire, les organismes et les équipes intervenant dans l’accueil et l’accompagnement des personnes consommatrices peuvent collaborer avec les organismes spécialisés dans la santé sexuelle.
Le non-jugement est un principe important qui permet d’instaurer une relation de confiance avec la personne qui recherche du soutien.
De nombreux aprioris et représentations existent sur les personnes qui consomment des substances et qui sont en situation de parentalité. La forte dimension morale associée aux problématiques d’addiction comporte des risques importants en termes de stigmatisation.
En tant que droit humain, le désir d’enfant doit être compris et accueilli chez les personnes qui font usage de substances ou qui sont dépendantes, est un prérequis important pour adopter une posture non-jugeante dans l’accompagnement.
Les professionnel.x.le.s doivent impérativement prendre conscience des représentations et des risques de stigmatisation, notamment en lien avec la question du genre et les nombreux tabous qui existent autour de la consommation des femmes.
Une recherche menée par Anamaria Colombo a donné la parole aux personnes directement concernées par ces questions et permis de produire une série de recommandations pour garantir une posture adéquate dans l’accompagnement.